Que prévoit la loi belge en matière d’avortement ?
Quelles sont les conditions pour qu’une IVG puisse être pratiquée légalement en Belgique ? Qui peut avorter et qui peut pratiquer un avortement ?… Frédéric Brichau, coordinateur du Centre de Planning familial Willy Peers, nous éclaire sur ce qui fait encore débat aujourd’hui d’un point de vue juridique.
Quelle est la loi qui autorise l’avortement en Belgique ?
Un réel combat a été engagé pour obtenir un changement et une nouvelle loi a été promulguée le 15 octobre 2018. Elle établit la liberté individuelle que la personne enceinte doit pouvoir exercer et remplace la première loi du 3 avril 1990 qui était une dépénalisation partielle de l’avortement interdisant sa pratique avec des sanctions pénales sauf si certaines conditions étaient respectées. Pourtant, cette nouvelle loi induit encore une pénalisation partielle de l’avortement, c’est-à-dire que les conditions dans lesquelles l’avortement peut être pratiqué ont été légèrement allégées, mais si ces conditions ne sont pas respectées, des sanctions pénales sont encore de mise. Sur le terrain, cette épée de Damoclès plane toujours au-dessus des femmes qui décident d’avorter et des médecins qui pratiquent l’IVG : un risque d’emprisonnement est encore d’actualité aujourd’hui en Belgique.
Dans quel délai l’avortement est-il autorisé ?
On peut interrompre une grossesse en Belgique jusqu’à 12 semaines de grossesse. Il y a là une subtilité scientifico-juridique puisque le législateur parle de semaines de grossesse, or dans le milieu médical, on parle de semaines d’aménorrhées, c’est-à-dire à partir de la date des dernières règles. Les 12 semaines de grossesse sont donc ramenées à 14 semaines d’aménorrhées. Au-delà de ce délai, l’avortement est interdit et ne peut plus être pratiqué sur le sol belge, sauf pour des raisons médicales conséquentes. La patiente devra alors se rendre à l’étranger si elle veut recourir à un avortement.
Qui peut avorter ?
L’avortement est un droit, toutes les femmes sont donc libres d’avorter. Néanmoins la loi belge prévoit un ensemble de conditions qui doivent être respectées. Celles-ci sont l’âge de la grossesse tel que déjà mentionné ; un délai de six jours doit s’être écoulé entre la première consultation et l’intervention à proprement parler et le lieu de l’intervention qui doit être un centre hospitalier ou extra hospitalier (Centre de Planning familial pratiquant l’IVG). La seule exception prévue par la loi sont les IVG thérapeutiques lorsque la grossesse met en danger la santé de la mère ou si des examens démontrent que l’enfant à naître est atteint d’une maladie incurable.
Il n’y a, par contre, pas d’exclusion en ce qui concerne les personnes qui peuvent avorter. Même une mineure d’âge, une femme célibataire, ou toute femme enceinte qui n’a pas dépassé le délai légal de 12 semaines peut recourir à un avortement.
Comment garantir la confidentialité ?
Les équipes des Centres de Planning familial sont des professionnel·le·s, des médecins, des psychologues, des assistant·e·s sociaux·ales, des sexologues, des juristes… tou·te·s soumis·es à un code de déontologie. Le secret médical et le secret professionnel sont dès lors mis en place. Ceci garantit que dans la prise en charge par un Centre de Planning familial, les informations soient traitées de manière totalement confidentielle et avec le plus grand respect de la patiente.
Y a-t-il un aspect légal dans le rôle de la·du médecin ?
L’IVG est une pratique médicale et ne peut pas être pratiquée par une personne n’ayant pas un diplôme de médecine. La majeur partie des médecins de Centres de Planning familial sont des généralistes qui ont une formation supplémentaires dans la pratique de l’avortement ou de la petite gynécologie. La·le médecin généraliste ne pratiquera pas un avortement si elle·il n’est pas formé·e et ne dispose pas d’un équipement spécifique et indispensable à l’intervention. Pour la méthode médicamenteuse, il faut avoir accès aux médicaments qui ne se trouvent pas en pharmacie ordinaire. Pour cela, les Centres ont des conventions avec les pharmacies des hôpitaux, seules à pouvoir délivrer le médicament de base, la mifégyne. Un·e gynécologue est formé·e et sait pratiquer un avortement, par contre dans certaines structures hospitalières, une pression est exercée pour empêcher les gynécologues de pratiquer l’IVG. On sait que certains hôpitaux ne pratiqueraient pas d’avortement alors que techniquement, ils sont parfaitement équipés pour le faire.
Que signifie la notion de clause de conscience?
La clause de conscience est le droit reconnu à certain·e·s professionnel·le·s, dans leur statut légal, de s’opposer à une décision ou de ne pas accomplir un acte comportant des enjeux éthiques importants. Un·e médecin évoquant la clause de conscience peut dire, pour des raisons personnelles, « Je ne veux pas pratiquer l’avortement ». Dans ce cas, il est fondamental qu’elle·il l’annonce au plus vite afin que la femme qui a effectué une demande d’avortement puisse être renvoyée vers les services compétents immédiatement.
Ma Vie en PLUS
L’IVG doit être accessible à toutes les femmes, sans pression sociale, sans tabou et sans culpabilisation. Dans l’optique d’améliorer l’accès des femmes à l’IVG en Belgique, la Fédération Sofélia revendique plusieurs avancées et met en garde face aux attaques directes et indirectes à la liberté de disposer de son propre corps. Toutes les informations relatives à ce combat se retrouvent sur le site www.sofelia.be