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Parler de la fin de vie ? Pas mortel !

Épisode 8 -

Si la mort fait partie intégrante de la vie, en parler reste très compliqué. La Belgique est pourtant une bonne élève en matière de sensibilisation sur le sujet. Mara Barreto, chargée de projets en santé et fin de vie pour l’asbl Liages, nous explique les dernières démarches entreprises au sein de l’asbl, dont les « Mortels Cafés ». 

Parler de la fin de vie et de la mort reste un des sujets tabous dans notre société. Ces thématiques engendrent encore des peurs, des réactions de fuite, de refus. Certains seniors voudraient en parler plus ouvertement mais éprouvent des difficultés car leur entourage ne souhaite pas aborder le sujet : « Mais comment peux-tu parler de cela, c’est encore tôt ! ». D’autres éprouvent aussi des difficultés à exprimer leurs souhaits, leurs directives anticipées. Et là, c’est souvent la famille qui rencontre des problèmes pour définir où ils se situent par rapport à certaines démarches. Cette année, l’asbl Liages a organisé une campagne d’information et de sensibilisation sur la thématique de la fin de vie: « La fin de vie, c’est mortel ! Parlons-en tant qu’il est temps. » Un des volets de cette campagne, les « Mortels Cafés », offre une occasion privilégiée d’aborder le sujet en groupe.

« Mortel Café », de quoi s’agit-il exactement ?

Les Mortels Cafés sont des moments de rencontre et d’échange destinés principalement aux seniors. Autour d’un café, nous parlons de la mort, de ce qui est important pour chacun·e en fin de vie, des dernières volontés. Ce n’est pas nous qui avons inventé ce concept. C’est un sociologue, Bernard Crettaz, qui a lancé le premier café il y a une vingtaine d’années en Suisse. Nous nous sommes inspirés et nous l’avons adapté à notre sauce.

Y a-t-il des Mortels Cafés sur le thème de l’euthanasie ?

Nous avons demandé à notre public s’il voudrait venir à un deuxième café pour approfondir certaines thématiques. C’est comme cela que nous avons commencé à organiser des cafés sur la thématique de l’euthanasie. Là, il est question des aspects pratiques, des conditions de la loi, de la déclaration anticipée d’euthanasie, des modalités d’enregistrement de cette déclaration auprès de la commune, etc. Après, nous avons commencé à organiser des cafés en collaboration avec le CAL, le Centre d’Action Laïque, sur la thématique des funérailles. Là, il est plutôt question du choix du mode de sépulture et des obsèques. Prochainement, Liages organisera aussi des cafés sur le thème des soins palliatifs.

L’idée est de pouvoir parler sans tabou ?

Oui ! L’ambiance est conviviale, il y a beaucoup de respect de la part des participant·e·s, et les informations données leur sont très utiles. Il y a quand même des propos qui se répètent à la fin, par exemple : « je me sens éclairé·e, je me sens serein·e, je vais en parler autour de moi, je vais remplir mes directives, mes déclarations anticipées. »

Quelles sont les déclarations anticipées que l’on peut remplir en Belgique ?

En Belgique, nous avons la possibilité de remplir cinq déclarations anticipées en lien avec la fin de vie, à savoir les déclarations d’euthanasie, de refus de traitement (aussi appelée déclaration négative), de don d’organe, de don du corps à la science et finalement des dernières volontés quant au mode de sépulture. Trois des cinq déclarations peuvent être enregistrées auprès de la commune, celles concernant l’euthanasie, les dons d’organes et les dernières volontés quant au mode de sépulture. Toutes ces déclarations peuvent être retirées ou révisées à tout moment et vont avoir une durée de vie indéterminée, à l’exception de la déclaration anticipée d’euthanasie qui aurait été rédigée avant le 2 avril 2020. Toute déclaration anticipée d’euthanasie remplie avant cette date reste valable cinq ans. Il faut donc songer à la renouveler une dernière fois. À ce moment-là, elle deviendra illimitée.

En quoi consiste la déclaration anticipée d’euthanasie exactement ?

La loi belge permet à un·e médecin de pratiquer une euthanasie sur un·e patient·e qui se trouve dans un état d’inconscience irréversible dans la mesure où elle·il a rempli, à l’avance, une déclaration anticipée d’euthanasie. Il s’agit d’un formulaire officiel qu’il faut remplir en présence de deux témoins et si la personne le souhaite, elle peut aussi renseigner une ou plusieurs personnes de confiance qui seront chargées de transmettre sa volonté à la·au médecin. Il s’agit d’une déclaration qui peut être retirée ou révisée à tout moment et qui va permettre, le moment venu, à un·e médecin de pratiquer une euthanasie, si elle·il vérifie d’abord qu’il y a bien une maladie incurable grave et que la·le patient·e se trouve dans un état d’inconscience irréversible.

Et la déclaration anticipée de refus de traitement ?

La loi sur l’euthanasie ne s’applique pas dans le cas d’un arrêt des traitements ou de la décision de ne pas entamer un nouveau traitement. Ces deux situations tombent sous les champs d’application de la loi sur les droits de la·du patient. Il s’agit d’une loi qui nous permet, entre autres, de refuser un traitement, et ce de manière anticipée. C’est la raison d’être de cette déclaration de refus de traitement, appelée aussi déclaration négative, qui sert à préciser les traitements que nous refuserions dans les cas où nous serions dans une situation où nous ne pourrions pas nous exprimer. Parce qu’on peut être en incapacité de s’exprimer sans pour autant être dans un état d’inconscience irréversible. A titre d’exemple, c’est une déclaration qui nous permet d’acter que nous refusons une réanimation cardiaque, une alimentation artificielle ou un respirateur automatique.

Ma Vie en PLUS

Sur le site www.liages.be vous trouverez les détails de la campagne « La fin de vie, c’est mortel !… ». Vous y trouverez aussi les dates et lieux des prochains Mortels Cafés, parmi lesquels certains spécialement dédiés à l’euthanasie, des articles spécifiques sur la fin de vie, des brochures et l’agenda des prochains événements.