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Ambre “Je ne peux pas angoisser et rester les bras croisés ! »

Épisode 4 -

Ambre, 20 ans, a participé à l’enquête « Les 18-25 ans, génération angoissée » menée par Solidaris et Latitude Jeunes. Etudiante en art dramatique et petite dernière d’une famille de 6 enfants, elle revient sur son parcours, ses difficultés et sa vision du monde. Être jeune aujourd’hui, un vrai défi ?

Quelles sont les difficultés que vous rencontrez en tant que jeune et en tant qu’étudiante ?

Financièrement, c’est compliqué ! Mes parents ne gagnent pas suffisamment d’argent pour subvenir à tous mes besoins mais ils gagnent trop d’argent pour que je puisse bénéficier d’une bourse ou d’un autre type d’aide. Entretenir un·e enfant à la maison ou entretenir une enfant qui doit payer un loyer et des factures, ce n’est pas la même chose. Ils font ce qu’ils peuvent mais ce n’est pas facile. Financièrement, je ne sais pas comment on est censé s’en sortir en tant qu’étudiant et encore pire, si on n’a aucun parent pour nous aider.

Comment faites-vous dans ces conditions ?

Je m’adapte en plaçant des heures de job étudiant où je peux, le week-end notamment. Je travaille dans le tri des déchets soit dans les parcs à containers ou de grands hangars de tri, toujours pour la même intercommunale de traitement des déchets. Ce job étudiant me tient à cœur car il est lié au respect de l’environnement.

A côté de ce job, je fais de nombreuses démarches pour toutes les bourses et aides possibles et imaginables. Je vais également prendre des colis alimentaires mais cela implique souvent de choisir entre aller travailler ou aller prendre le colis car ils sont distribués durant les heures de travail.

J’ai également réussi à trouver des aides psychologiques pas trop chères en dehors de mon école. Ça aide à tenir le coup car c’est parfois compliqué moralement.

Comment envisagez-vous l’avenir ?

A l’heure actuelle, je suis très anxieuse. Je me sens angoissée par rapport à l’avenir, à demain, au mois prochain. Comment est-ce que je vais faire ? Mais aussi dans quelques années, quand je sortirai de l’école, est-ce que je pourrais trouver un métier même en ayant un ou deux diplômes dans la poche ? Est-ce que le monde dans lequel je vis va s’en sortir ? Est-ce que, écologiquement, comme on est partis, ça vaut encore la peine d’essayer d’avancer ?

Quelques fois, je réponds non à toutes ces questions : non, tu ne vas pas t’en sortir, non le monde est foutu. Ça m’angoisse.

Pourtant, même si tout ça est très stressant, je m’accroche beaucoup au fait qu’on ne peut pas éternellement vivre avec des œillères et que les gens vont finir par se réveiller.

Est-ce que vous vous sentez suffisamment entendue ?

Je n’ai pas l’impression d’être entendue à une assez grande échelle. Je suis entendue par les organismes qui s’occupent des jeunes, qui les aident à porter leur voix mais pas du tout par le monde politique. Lorsque les secondaires se sont mis à manifester pour le climat tous les jeudis, on a juste dit que ça allait leur passer. Quand on crie haut et fort que ça ne va pas, on nous dit : «  Retournez en cours ! Si vous avez le temps de manifester, d’ouvrir vos bouches, c’est que vous ne prenez pas assez à cœur vos études ». J’ai l’impression qu’on n’a pas conscience de la réalité des étudiant·e·s, qu’on nous remet à notre place en nous disant qu’on ne vit pas dans le vrai monde mais qu’en même temps, on nous demande de prendre les choses en charge.

Quand on voit que les ministres pensent qu’une année scolaire va nous coûter entre 4000€ et 5000€1, on se rend compte qu’ils ou elles ne sont pas du tout connecté·e·s au monde réel. Rien que pour mon loyer, sans facture, j’en suis à 6000€ ! On rajoute à ça toutes les factures d’électricité, d’eau, de gaz, la nourriture, les frais scolaires, de transport ou médicaux… Et puis, allez glisser des sorties là-dedans, des musées, des théâtres… On est loin du compte !

Comment vous engagez-vous pour changer les choses ?

Je m’engage via différents canaux. Je me suis engagée dans Latitude Jeunes dès mes 16 ans. J’avais très envie d’obtenir le brevet d’animatrice. Travailler avec les enfants me semblait être la chose à faire pour améliorer demain. Quand j’ai vu les valeurs que Latitude Jeunes enseignait aux enfants, j’ai su que je voulais faire ça. Ensuite, j’ai été portée à suivre Latitude Jeunes dans d’autres aventures. Actuellement, je travaille avec la Festi Team. On fait de la prévention sur les risques en milieu festivalier. Là, j’ai découvert une autre grande cause : protéger les gens ! J’ai su que prévenir, c’était guérir, vraiment ! L’engagement dans ces causes me permet de me sentir mieux car j’ai l’impression de changer les choses dans le bon sens du terme et ça, ça fait du bien !

Ma vie en PLUS

Vous souhaitez, vous aussi, vous engager, découvrez les différents projets de Latitude Jeunes sur www.latitudejeunes.be

 

 

  1. Valérie Glatigny, ancienne ministre de l’Enseignement supérieur, estimait, en juin dernier, le coût moyen annuel des études à 3.600€ pour les kotteur.euse.s et 960€ pour les navetteur.euse.s. Plus d’infos ici.