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Dépression : pourquoi une inégalité entre femmes et hommes ?

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Épisode 1 -

La dépression touche deux fois plus de femmes que d’hommes. Comment expliquer cette discrimination ? Comment l’éviter ? Et si la dépression n’était qu’un exemple parmi d’autres des inégalités de soins de santé entre les sexes ?

Les femmes vivent plus longtemps que les hommes, mais en moins bonne santé. Autrement dit, les femmes meurent plus tard que les hommes mais elles souffrent davantage de maladies chroniques. A la fois perturbants et hautement intéressants, ces constats sont au cœur d’une grande campagne sur les inégalités hommes/femmes dans les soins de santé, lancée en mai 2022 par Soralia. Premier volet de cette campagne : une étude sur la prévention des maladies, avec un exemple particulier : la dépression, un phénomène en pleine expansion. Focus avec Anissa D’Ortenzio, chargée d’études en santé et genres.

Avant la pandémie, on constatait déjà d’importants taux de dépression, toujours plus élevés chez les femmes que chez les hommes, et ce dans tous les pays. Avec le covid, ce taux a encore augmenté, dans les mêmes proportions de part et d’autre.

Cause #1 : la différence de diagnostic

Les femmes sont surdiagnostiquées et les hommes, à l’inverse, ne le sont pas assez. Les symptômes des femmes qui ont été considérés comme anodins : un fort sentiment de détresse, de tristesse, d’apathie, de ne plus vouloir être actif…etc. Les symptômes des hommes s’expriment différemment. Ils sont plutôt de l’ordre de l’agressivité, comportements dangereux ou addiction. On voit aussi que les hommes consomment moins de soins, parce qu’il y a cette image que l’homme doit être fort et ne pas exprimer ses émotions.

… et sa conséquence : Pour les femmes qui souffrent réellement de troubles dépressifs, il est important d’être diagnostiquée à temps. Mais, c’est trop souvent une maladie ‘fourre-tout’ qui amène à se tromper sur la cause : l’état dépressif peut cacher une autre maladie, comme l’endométriose, qui met en général sept ans avant d’être diagnostiquée. Un dernier exemple de schéma possible : certains effets secondaires de médicaments s’apparentent à la dépression. Parfois, il arrive que le médecin prescrive des antidépresseurs à tort. Ce cas de surmédicalisation ne règle pas du tout le problème d’origine. Pourtant il existe et est beaucoup plus difficile à mettre en avant.

Cause #2 : les facteurs de risques sociaux

Les violences, la charge mentale (vie de famille, travail, ménage…), et les discriminations au quotidien sont dans certains cas plus prégnants chez la femme. Une femme sur trois subit des violences en Belgique, et si elle est porteuse d’un handicap, on peut faire fois quatre! Les viols, aussi, provoquent, dans 80% des cas, un syndrome post-traumatique, donc encore essentiellement chez les femmes. La précarité économique, enfin : temps partiels, pension dévalorisée, congé à la place du mari pour s’occuper des enfants, réseautage plus difficile, différence salariale… Si la femme est moins rémunérée que l’homme, elle aura 2,5 fois plus de chances de tomber en dépression.

Les moyens de lutter

Le savoir, c’est le pouvoir. C’est l’objectif quotidien de Soralia : s’informer et sensibiliser pour agir ensuite. Cela étant, les solutions sont beaucoup plus structurelles, à prendre au niveau global pour enrayer le phénomène. En plus des discriminations vues plus haut, il faut prendre en compte la variété des symptômes au niveau médical et avoir une grille de lecture différenciée entre les hommes et les femmes. Et l’appliquer. Il faut donc former les médecins dans ce sens-là. Finalement, une meilleure parité au sein du couple, comme un congé de paternité égal à celui des mères favorise aussi cette égalité. Les études le prouvent : dans les pays les plus égalitaires connaissent une meilleure santé mentale et moins de dépressions.

Ma Vie en PLUS

Une large campagne consacrée à l’inégalité femmes/hommes dans les soins de santé a été diffusée en mai 2022. Elle aborde trois questions : la prévention (via le thème de la dépression ; la prise en charge via celui des maladies cardiovasculaires ; et enfin, le traitement à travers l’exemple de la recherche médicale. A lire absolument car s’informer c’est aussi mieux se soigner.