Familles monoparentales : « J’ai eu énormément peur ! »
Elodie a 36 ans et s’occupe, seule, de ses 5 enfants. Pour Ma vie en PLUS, elle revient sur son parcours, ses défis du quotidien et l’aide qu’elle a pu recevoir du « Relais familles mono », un dispositif d’accompagnement des familles monoparentales. Rencontre…
Elodie, pouvez-vous nous raconter votre parcours ?
Je me suis séparée de mon conjoint lorsque ma petite dernière avait 3 mois, suite à des violences conjugales. J’ai dû quitter mon domicile du jour au lendemain sans mes affaires personnelles ni celles de mes enfants et de ma fille de 3 mois. Heureusement, ma sœur a pu nous accueillir et nous héberger quelques temps.
Je me suis battue pour nous trouver un appartement. C’était très compliqué car dès que je disais que j’avais 5 enfants, j’essuyais un refus de la part des propriétaires. J’ai fini par trouver un logement et on y est très bien.
Quels étaient vos premiers ressentis en réalisant que vous alliez élever seule vos enfants ?
J’ai eu énormément peur ! Je crois que ça a été la pire peur de ma vie. Je me suis demandé si j’allais arriver à gérer financièrement, si j’allais pouvoir gérer tout le quotidien de A à Z… C’était très compliqué d’autant que j’occupais un travail à responsabilités. On s’en sort car on n’a pas le choix !
Avez-vous été confrontée à des jugements ou des incompréhensions de la part de votre entourage ou de la société ?
J’ai reçu pas mal de soutien de la part de mon entourage qui connaissait la situation. Par contre, j’ai reçu beaucoup de jugements de la part de personnes extérieures. Quand on dit qu’on est maman solo de 5 enfants, on reçoit des remarques du type : « Il y a 5 papas différents ? » ou encore « Tu les as fait pour les allocations familiales ? ». Nous sommes aussi souvent étiquetés de famille de « cas sociaux » ou de gens sales parce qu’on a plusieurs enfants.
Ces jugements, sans connaitre mon parcours, me touchent. Les gens jugent s’en savoir ce que j’ai vécu, ce par quoi j’ai dû passer, les batailles que j’ai menées. C’est peut-être le plus dur, ce regard des gens.
Y a-t-il des moments où vous vous sentez particulièrement seule face à certaines responsabilités ?
Oui, au fil du temps et de la charge que représente la gestion de la famille, je me suis épuisée. Mon corps n’en voulait plus. J’ai voulu assurer de front ma vie de maman, de travailleuse, de femme mais c’était trop… Je me suis complètement renfermée sur moi-même. Je ne sortais plus de chez moi à part pour emmener les enfants à l’école et pour aller à mes rendez-vous médicaux.
Comment êtes-vous sortie de cette dépression ?
Un jour, ma sœur a vu passer une publication sur Facebook pour le « Relais familles mono ». C’est un dispositif d’aide et de soutien à l’accompagnement des familles monoparentales en Wallonie. J’ai beaucoup hésité à y aller mais j’ai quand même franchi le pas. Dès la première rencontre, je me suis sentie bien. Je suis sortie de là plus sereine parce que j’avais pu échanger avec des mamans ayant un vécu semblable au mien. Le « Relais familles mono » est devenu mon moment à moi, où je me libère de la charge mentale que je subi constamment, où je discute de tout, de rien et où je me sens bien.
Quels types d’activités faites-vous au « Relais familles mono » ?
On fait tout type d’ateliers, plus ou moins une fois par semaine. Ça va de l’atelier grimage d’Halloween avec les enfants à l’atelier de cuisine en passant par la séance de sophrologie entre mamans.
Ce que j’apprécie énormément, ce sont les sorties avec les enfants. Sortir seule avec 5 enfants, c’est compliqué, aussi bien logistiquement que financièrement. Dans le cadre du « Relais familles mono », c’est beaucoup plus simple, c’est pris en charge financièrement et toutes les mamans et papas s’entraident pour s’occuper des enfants durant la sortie. Récemment, nous sommes allé·e·s voir l’expo Harry Potter à Bruxelles avec les enfants ou encore, l’expo Cordons, sur les familles monoparentales, à la Citée Miroir, entre adultes.
Est-ce que ces ateliers ont aussi eu un impact positif sur les enfants ?
Oui, absolument. Ils adorent y aller. Ça leur permet de créer des liens avec les enfants des autres mamans ou papas, des enfants qui ont un vécu et un quotidien similaires. Ils et elles se sentent compris·e·s. Ça leur permet aussi de découvrir des choses nouvelles, de s’épanouir, de sortir de la maison. Ça nous fait du bien à tou·te·s.
Ce soutien pour les familles monoparentales, il est essentiel ?
Oui et je pense que les familles monoparentales devraient être encore beaucoup plus soutenues. Nous sommes bien souvent trop seul·e·s, confronté·e·s à de nombreuses difficultés. Je n’ai trouvé aucune aide à part le « Relais familles mono ». J’ai été souvent seule sans savoir vers qui me tourner.
Comment vous sentez-vous aujourd’hui ?
Je me sens fatiguée mais plus positive. J’espère un jour pouvoir offrir un toit à mes enfants, un vrai toit en achetant notre maison. Je continuerai à batailler pour amener le meilleur à mes enfants.
Ma vie en PLUS
Vous êtes également parents solo et souhaitez un accompagnement à la parentalité ? N’hésitez pas à prendre contact avec l’antenne des « Relais familles mono » de votre région. Vous pouvez également découvrir les activités du Relais sur Facebook.
Le service social de Solidaris, qui participe au Relais familles mono, est également là pour vous aider. Handicaps, pensions, tarifs sociaux, études, allocations… La porte est grande ouverte…
L’exposition « Cordons » dont on aperçoit quelques images dans la vidéo, est le résultat du travail du photographe Christophe Smets et de la journaliste Camille Wernaers. Un travail de sensibilisation sur les réalités des mamans solos en Wallonie. L’enjeu est de taille puisque le contexte de restrictions budgétaires actuel risque d’impacter fortement les familles monoparentales.