Les femmes en pole position face aux maladies cardiovasculaires : pourquoi ?

Les maladies cardiovasculaires sont la première cause de maladie chez les femmes. Étonnant ? Non, logique. Dans la prise en charge des maladies, celles-ci sont généralement plus suivies que les hommes, mais moins bien soignées ! Le pourquoi du comment… 

Certaines inégalités entre les sexes apparaissent jusque dans des secteurs incongrus. La prise en charge de certaines maladies par exemple. Anissa D’Ortenzio, chargée d’études en santé et genres auprès des Femmes Prévoyantes Socialistes, dévoile les résultats d’une récente enquête sur le sujet, basée sur des études scientifiques émanant des ligues de cardiologie. « Notre rôle est plutôt celui de ‘vulgarisateur’ : on prend tout ce qui existe de scientifique et on essaie de le rendre accessible à un nombre maximum de personnes. En parlant de nos constats, on découvre des témoignages de personnes et des expériences vécues. Par exemple, le cas d’une maman qui a eu un infarctus du myocarde et pour laquelle les symptômes prédominants étaient des troubles digestifs : son manque d’information lui a fait d’abord penser à une indigestion, c’est à l’apparition d’autres symptômes aux urgences qu’on a vraiment su de quoi elle souffrait..

Pour Ma Vie en PLUS, Anissa liste les causes à l’origine de cette inégalité face aux maladies cardiovasculaires. Laissez-vous surprendre…

Cause #1. Une femme sur deux éprouve des symptômes différents des hommes

De nombreux prestataires de soins ignorent que les femmes et les hommes peuvent ressentir des symptômes différents en ayant pourtant la même maladie. C’est le cas des maladies cardiovasculaires où une femme sur deux aura des symptômes dits ‘typiques’, c’est-à-dire identiques aux  hommes : une douleur qui irradie du thorax vers le bras pour supposer un infarctus. En revanche, une femme sur deux rencontrera des troubles digestifs, des nausées, une grande fatigue persistante, un essoufflement à l’effort (parfois même au repos), des palpitations, une oppression thoracique ou même une difficulté à respirer. Autre exemple, l’AVC : les symptômes typiques sont la bouche de travers, trouble du langage…etc. Mais les symptômes atypiques chez les femmes seront moins faciles à identifier : perte d’équilibre, étourdissement, nausées, souffle court…etc.

Cause #2 : Le retard dans la prise en charge et le diagnostic

En moyenne, les femmes sont prises en charge deux heures plus tard que les hommes qui ont la même maladie. C’est un vrai problème dans le cas des maladies cardiaques qui doivent être traitées le plus rapidement possible pour pouvoir sauver la personne. Des symptômes méconnus, différents ou difficiles à identifier retarderont le diagnostic parce que les femmes ou leur entourage ne connaissent pas ces différences. Aux urgences, ensuite, on a trois fois plus de chance d’entendre, pour la même maladie cardiaque, que c’est du stress, c’est dans la tête, c’est une dépression. Ce mauvais diagnostic est en grande partie responsable du retard. Mais aussi, les médecins ne reconnaîtront pas immédiatement ces symptômes, ce qui retardera encore le diagnostic. Un exemple : un·e étudiant·e en médecine sur deux ne sait pas que les maladies cardiovasculaires sont la principale cause de mortalité chez les femmes.

Cause #3 : le syndrome de Yentl et le syndrome méditerranéen

Un autre problème plus général, pas uniquement lié aux maladies cardiovasculaires, est de ne pas reconnaître la douleur à sa juste valeur chez les femmes. C’est notamment le cas avec les douleurs menstruelles et l’endométriose où l’on peut tomber dans le « syndrome de Yentl». Il consiste à penser que la personne devant vous, par ses origines ou son sexe, aura tendance à exagérer ses symptômes et sa douleur.  Concernant le manque de prise en compte de la douleur chez certaines personnes liées à leurs origines, on parle communément du « syndrome méditerranéen ». Autrement dit, de racisme structurel dans le domaine médical.

Et donc, dans tous les cas, on minimisera la douleur des personnes concernées, ce qui peut amener à un diagnostic retardé ou erroné et provoquer de grandes souffrances.

Des pistes de solutions :

  • Utiliser des mannequins féminins dans les cours de secourisme.
  • former les médecins aux maladies selon le sexe et les symptômes différenciés, dès leur formation, à l’université ou sur le terrain.
  • informer et sensibiliser le grand public à ces différences de symptômes, parce que si la femme elle-même ne se rend pas compte qu’elle fait une crise cardiaque, elle ne pourra pas réagir. Idem pour son entourage, qui ne pourra pas prévenir les secours suffisamment tôt.

Ma vie en PLUS

Tout au long du parcours de soins – de la prévention et la prise en charge des maladies cardiovasculaires, jusqu’aux examens et au rétablissement, il existe donc des inégalités liées au genre. Le fait de ne pas prendre en compte les douleurs de la femme, de moins connaître ses symptômes ou de constater que les examens ne sont pas adaptés pour elles ne favorisent pas une bonne prise en charge. Le but des FPS est d’informer le plus grand nombre pour que cela devienne un réflexe, autant chez les femmes que chez les hommes. Publié en mai 2022 par les FPS, le rapport sur l’inégalité des femmes peut être consulté en ligne sur www.femmesprevoyantes.be/derniere-campagne-2-3/